Eulalio Ferrer est un républicain espagnol, natif de Santander, réfugié en 1940 au Mexique où il fit carrière et devint un grand publiciste reconnu aux Etats-Unis. Il raconta son passage dans les camps français de la Retirada par l’écriture d’un journal qui fut publié en France sous le titre Derrière les Barbelés chez L’interdisciplinaire, une maison d’édition de Limonest, en 1993. Suite…
15 août 1939.
Pour la section de la Compagnie de Travail dont Eulalio s’occupe, on lui demande de remplir de nouvelles rubriques: les armes dans lesquelles les hommes excellent… Pourquoi cela alors que leur travail consistera à manier la pelle et la pioche ? En ce qui le concerne, Eulalio laisse vide cette colonne car sa meilleure arme est le stylo !
Des personnes viennent lui demander d’adhérer aux Jeunesses Socialistes, ce qui signifie pour lui rompre définitivement avec les Jeunesses Socialistes Unifiées, devenues Jeunesses Communistes. Cela lui fait mal et est pour lui l’occasion d’écrire une longue dissertation sur son amour de la liberté et de la justice sociale, loin du dogmatisme marxiste. On ne connaît pas la réponse qu’il donna à ses amis.
La nouvelle alarme du camp pour annoncer les repas ressemble tant à celle qui, pendant la guerre, annonçait les bombardements que, dans un réflexe pavlovien, Eulalio comme d’autres se mettent à courir en l’entendant. Cette peur est augmentée par les bruits qui se répandent dans le camp selon lesquels la Wehrmacht se déploierait à la frontière de la Pologne.
Pour en revenir à la nourriture, elle s’est améliorée après les nombreuses protestations des détenus.
L’après-midi, Eulalio rend visite à un ami à l’hôpital pour lui porter les médicaments que sa famille lui a envoyés. On entend les lamentations des hommes qui courent d’un lit à l’autre. Ce sont les mutilés les plus sereins qui n’hésitent pas à se partager les objets que laissent ceux qui viennent à mourir. Celui qui crie le plus est un homme qui a chuté en voulant prendre une photo nocturne du camp depuis le crématoire et qui s’est fracturé membres et côtes. On pense qu’il n’en a plus pour très longtemps.
En retournant au camp, Eulalio s’aperçoit qu’il y a de plus en plus de militaires autour de celui-ci, au « Lido ». Ce qui lui fait penser qu’il sera difficile de s’évader et de rejoindre Perpignan. Pourtant le projet n’est pas abandonné. Surtout que les départs pour les Amériques sont suspendus du fait du conflit entre les associations s’occupant des réfugiés, la SERE et la JARE.
A suivre le 17 août…











