Note: pour faciliter la lecture de cet Itinéraire, les 6 articles publiées en février ont été reclassés. Ainsi, en parcourant les pages du blog, l’histoire du grand-oncle Séraphin apparaît dans le « bon » ordre chronologique, plus intéressant à lire que l’ordre de parution. En conséquent, d’autres articles ont aussi été déplacés.
L’Armistice a été proclamée, la guerre est finie… pas la période militaire de Séraphin qui « doit » encore presque une année à la Nation. Pas de carte célébrant le 11 novembre 1918, mais tout de suite, les Artilleurs Alpins se mettent en branle en direction de l’Alsace pour une occupation hautement symbolique, puisque la re-conquête de cette région était l’objectif principal de cette guerre…
Mais cette « randonnée » ne sera pas une promenade de santé !
Ainsi, le 19 novembre, il écrit: Aujourd’hui, repos. Je vous assure que c’est guère le filon de traverser les Vosges en cette saison… et plus loin: Nous avons eu la neige sur le dos ces deux jours que nous venons de passer. Aujourd’hui nous sommes à Barr… Je pense vous dire que nous allons à Strasbourg.
L’hiver est précoce dans les Vosges en novembre 1918 !
Première remarque et cela est normal puisque l’Alsace fait partie du Reich depuis 1871, toutes les cartes que Séraphin enverra seront des cartes postales allemandes, colorisées pour la plupart, avec beaucoup de cartes fantaisies.
Seconde remarque,
Partout, on est acclamé.
C’est vrai qu’il est rare que des vainqueurs soient sifflés… mais le retour dans la République de l’Alsace-Lorraine ne sera pas une marche triomphale car le Reich avait pris soin de donner pas mal d’autonomie à cette province. Le centralisme républicain ne passera pas très bien chez les Alsaciens-Lorrains fortement attachés à leur particularisme. Mais cela est une autre histoire que Séraphin ne perçut pas.
Il comprit vite la spécificité linguistique autochtone comme en témoigne cette carte du 7 décembre 1918.
Vers le milieu de l’écrit: Comme je vous l’ai dit, nous sommes dans un nouveau village. Mais comme dit Justin Lafond (un pays certainement) on ne risque pas de comprendre ce qu’ils nous disent, c’est pire qu’en Italie. Les langues d’un Français-Provençal et un Italien sont plus proches que celles de ce même Français-Provençal avec un tout nouveau Français-Alsacien.
L’unité va se déployer et se déplacer dans plusieurs villages au sud de Strasbourg, successivement Lipsheim puis Plobsheim où ils resteront un moment.
Un petit peu de nostalgie pointe dans cette autre carte également partie le 7 décembre:
Après la soupe de ce matin, nous sommes allés nous promener au bord du Rhin. Je me serais bien cru dans l’île de la Piboulette. Il y en a même qui se promenaient en bateau, petits bateaux comme chez nous. Caderousse lui manque, une longue permission surtout, qui arrivera bientôt.
Par contre, ils sont quelquefois bien logés, chez l’habitant, comme le 6 décembre:
Sommes deux brancardiers ensemble qui avons trouvé un lit dans le village ce qui évite de coucher sur le dur. On a très bien dormi cette nuit. Ce qui devient encore mieux quand le second brancardier part en perm…
Aucune carte de janvier 1919. Séraphin a enfin obtenu cette permission de longue durée (20 jours au moins) et a pu se ressourcer. Il revient donc en février 1919 et voilà la première carte avec légende en français.
Ils ont toujours à Plobsheim, très bien logés chez des …….? Des paysans? Bizarre autant de faute? Mais ils ne vont pas tarder à se déplacer. Il l’annonce le 13 février
C’est 9 h. et on va manger la soupe et après on part. Nous allons entre Barr et Schelestadt (Sélestat). Il y a exactement 28k. Petite trotte à pieds. Ca fait rien. Quel fourbi ses changements. Ma nouvelle adresse est celle-ci…
Car Séraphin vient de changer de groupe au 2ème Régiment d’Artillerie de Montagne, passant du 2ème groupe au 1er groupe. D’où l’achat après-guerre de ce petit fascicule
en tout point semblable à celui du lieutenant-colonel Castaing mais signé par le chef d’escadron Stacchini le 6 janvier 1920, le Commandant provisoire du Régiment. En page 16 (/20 pages),
il ajoute en marge: A partir de ce moment, je fis partie du 1er groupe et fut affecté à la 2ème batterie. Ce qui va nous permettre de suivre la fin de sa période militaire jusqu’à sa démobilisation.
Il ne perd pas au change dans cet envoi du 15 février.
Deux mots avant de me coucher. Suis dans la chambre du curé comme je l’avais dit. Le brancadier qui couchait avec moi est passé à la 1ère batterie (ce ne doit pas être facile pour brancarder quand on n’est pas ensemble !) et comme elle n’est pas dans le même village que nous, il est parti. Ça fait que je suis tout seul ce soir, à côté de ce lit tout blanc avec un édredon à …., je suis sûr qu’il y a des officiers qui ne couchent pas si bien que ce soir. Quelle trouvaille. Je vois que la bonne a mis une bouillotte dedans, c’est bien la 1ère fois de ma vie.
Comme Séraphin ne nous le dit pas mais le livre oui, ils sont donc un peu plus au sud dans la plaine d’Alsace, en face de Sélestat.
La 1ère batterie à Boofzheim, la 2ème (celle du grand-oncle) à Gersheim et la 3ème, avec l’Etat-Major à Huttenheim.
Le 17 février,
il pleut et ce n’est guère agréable, la neige a fondu. C’est toujours …. de l’hiver.
Mais un nouveau déplacement attend le 1er groupe du 2me R.A.M.: l’occupation de l’Allemagne.
Une carte-photo d’un groupe d’artilleurs alpins avec leur nouvelle tenue bleu horizon qu’ils ont touchée avant de quitter Saint-Dié, posant au bord du Rhin, à Viebolsheim (Diebolsheim ?) le 10 février 1919. Séraphin debout à l’extrême-droite.
Une pochette de cartes postales, souvenir des événements que Séraphin vécut en novembre 1918 et qu’il conserva: l’entrée des Français à Strasbourg.
Cela se présente comme un long dépliant de 10 cartes:
On y voit, entr’autre, une prise d’armes sur la place Kléber de Strasbourg
ou cette marche des unités françaises qui devait rappeler bien des choses (et des souffrances) au grand-oncle !
à suivre…