C’est Jeannot Tschanz qui me conseilla d’aller faire un tour à Viviers avec le déplacement du monument aux morts, chose assez compliquée à réaliser. A Montélimar, Thierry Cornillet s’y cassa les dents au moment où il essayait de développer son projet des Allées Provençales dans les années 90.
En effet, à Viviers, la municipalité de François Louvet a réussi à déplacer en 2014 le monument aux morts de la ville, certainement au prix de litres de salive et quelques volumineux dossiers. mais en aucun cas ce n’était le monument situé tout en haut de l’ancien cimetière qui fut descendu en bas… mais le premier monument qui était déjà dans la ville, élevé en 1921 grâce à une forte aide du maire de l’époque le comte Joseph Pavin de Lafarge qui en paya les 3/4 de ses deniers personnels.
Quelques vues de ce monument, maintenant dans la cour de mairie, en bordure de la RN86.



Si ce monument vaut pour la statue que l’on doit au sculpteur Maxime Real del Sarte, c’est l’autre mémorial tout en haut du cimetière ancien, qui mérite le détour, pour peu qu’on soit un tantinet sportif ! Quelle grimpette !

Première constatation, ce n’est pas un monument classique mais un tombeau car manifestement, il contient les restes de 24 Poilus dont les corps ont été ramenés du front. C’est ce qui écrit sur la plaque du haut.

Etait-ce une volonté collective de rassembler les morts au même endroit ? Très certainement.
De part et d’autres de l’édifice central, neutre religieusement, deux plaques contenant les noms de ceux qui n’ont pu être inhumés dans ce caveau. Les disparus, ceux enterrés dans des cimetières militaires proches des champs de bataille ou ceux inhumés dans les caveaux familiaux, volonté de leurs familles.


Ici figurent 117 noms ce qui fait en tout 141 MPLF pour ce gros bourg de Viviers dont le recensement de 1911 nous apprend qu’il comptait 3 459 habitants (4% de la population). Le même nombre que sur le Monument de la ville.
A côté du monument, des reliques de plaques de tombes disparues, abandonnées, faute de descendants pour le s entretenir.

On y distingue quelques noms de gars de la liste: Paul Faure, Gasquet Léon (mort à 45 ans, un vétéran), Rouchet Léon, Trichet Marius, les frères Chausson Gustave et Paulin, Serret Clément. 5 plaques sont totalement illisibles.
Et puis à gauche du monument, une série de 9 croix blanches avec seulement marqué sur chacune d’elles, nom, prénom et grade. Une rapide recherche sur le site Mémoires des Hommes nous donne la solution de l’énigme.

A Viviers étaient installés deux hôpitaux, l’hôpital complémentaire n°79 certainement dans le séminaire et l’hôpital bénévole n°125 dans des bâtiments appartenant à Lafarge, où furent soignés, semble-t-il des Poilus atteints de maladies pulmonaires. Décédés à Viviers, ils y furent enterrés et on les y laissa. De qui s’agit-il ? Malgré quelques erreurs d’orthographe, les voici en détail…
Jean Veyrier (1894-1917) né à Tunis, 15ème section d’Infanterie Militaire (abréviation bizarre) mort de pneumonie + méningite.
Michel Paramelle (1896-1919) né dans le Lot, 54ème Régiment de Tirailleurs Sénégalais, mort d’hémoptysie (certainement tuberculose).
Marius Derobert (1889-1918) né en Haute-Savoie, 55ème Régiment d’Infanterie, mort de maladie (sans plus).
Pierre Hersant (1878-1918) né en Ille-en-Vilaine, 41ème Régiment d’Infanterie, mort de maladie (sans plus).
Dinh Van Lieu (1885-1918) né au Tonkin (Van Lang), 1er Bataillon Indochinois, mort de maladie (sans plus).
Joseph Simon (1893-1915) né dans le Cher, 29ème Régiment d’Infanterie, mort de tuberculose.
Pierre Le Chaffotec (1885-1917) né dans les Côtes du Nord (actuellement Côtes d’Armor, 35ème Régiment d’Infanterie Coloniale, mort de tuberculose.
Alexandre Nehlig (1876-1917) né dans le Morbihan, 111ème Régiment d’Artillerie Lourde, mort de maladie (sans plus).
Jules Giardina (1889-1919) né en Aveyron, 4ème Groupe d’Artillerie d’Afrique, mort de brocho-pneumonie virale.
Il fallait le dire.
Non loin de ce Mémorial, se trouve cette tombe remarquable qu’on penserait trouver plutôt au Père Lachaise…
