Comme l’avaient prévu les anti-nucléaires, le Tour a mis 13 ans avant de revenir au Ventoux, après le non-événement de 1974. Mais il y revient pour du grand spectacle.
Nous sommes le dimanche 19 juillet 1987 pour la 18ème étape, un contre-la-montre individuel de 36,5km entre Carpentras et l’Observatoire. Le Tour a changé de dimension, des concurrents de pays neufs au cyclisme ont fait leur apparition et l’événement est devenu mondial grâce à la télévision. Le matériel technique a évolué (voir le nombre de camions au sommet pour l’arrivée sur la photo ci-dessus) et le public est présent en masse.
Le grand favori n’est pas au Tour de France. L’Américain Greg LeMond, vainqueur en 1986, soigne depuis le 25 avril sa grave blessure à l’abdomen et au thorax provoquée par un accident de chasse aux Etats-Unis. On redoute, à tort, qu’il ne retrouve jamais son niveau sportif. Il sera de retour 2 ans plus tard pour gagner 2 autres Tours dont un pour… 8 secondes.
Quant à Bernard Hinault, il a raccroché symboliquement le vélo le 9 novembre dernier, lors d’un cyclo-cross organisé près d’Yffiniac, chez lui, en Bretagne.
C’est le Drômois Charly Mottet qui fit ses classes au VCRP (Vélo Club Romanais-Péageois) qui porte le maillot jaune à Carpentras. Il court pour Système U comme Laurent Fignon, dirigé par Cyrille Guimard qu’on a connu sur un vélo en 1972.
Il fera une montée honnête mais concédera 3’58 » au vainqueur du jour (9ème place) ce qui lui fera perdre son paletot jaune.
Les autres favoris du Tour:
L’Irlandais Stephen Roche finira 5ème à 2’19 » du vainqueur.
Pedro Delgado de Segovia sera 3ème à 1’51 ».
Mais le favori du jour, c’est le Colombien Luis Herrera dit Lucho, que tous voyaient comme un poisson dans l’air à oxygène raréfié du Ventoux, lui, l’habitué des cols à 3000 ou 4000 mètres dans la Cordillère des Andes. Il devra se contenter de la seconde place à 1’39 » de la locomotive du jour…
JEAN-FRANÇOIS BERNARD !
Un jeune espoir français de 25 ans qui réalisa peut-être l’exploit de sa carrière, cet après-midi-là sur les pente du Géant de Provence comme l’attestent les écarts qu’il réalisa.
Laurent Fignon, par exemple…
double vainqueur des Tours de France 1983 et 1984, termina à plus de 9′ et
La presse, ce jour-là, pensa avoir trouvé le successeur de Bernard Hinault comme le titre la une de l’Equipe du lundi 20 juillet…
ou ces titres intérieurs.
Ou avec un autre Bernard, Bernard Tapie mentor de son coureur…
dans son équipe Toshiba.
Ce soir-là, au Ventoux, non seulement Jeff gagna l’étape mais prit le maillot jaune avec une belle avance sur le second, Stephen Roche, relégué à 2’34 ».
Malheureusement la joie du clan Tapie fut de courte durée puisque le lendemain, une crevaison au mauvais moment sur la route de Villard-de-Lans fit perdre son maillot à Jean-François Bernard, qui termina seulement à la troisième place au général à Paris derrière Stephen Roche et Perico Delgado.
Un Roche célébré par les magazines souvenirs d’après-Tour…
auteur en cette année 1987 d’un triplé historique:
GIRO d’ITALIA-TOUR de FRANCE-CHAMPIONNAT du MONDE.
Jean-François Bernard, peu aidé par la chance, réalisa une bonne carrière, pas tout à fait celle que son exploit au Mont-Ventoux du 19 juillet 1987 permettait d’envisager. Il fut un précieux capitaine de route de l’équipe Banesto pour épauler le grand Miguel Indurain dans ses succès de juillet, au début des années 90.
Pour nous, avec Hugues Audouard et ses enfants, nous passâmes une bonne journée au Ventoux,
contents mais… cuits par le soleil de Provence.