Le saviez-vous: au cœur du bourg ancien du Crès, devant l’église et à 2 pas de la mairie, passe au même endroit 3 chemins dont 2 historiques: la Via Domitia, le Chemin de Saint-Jacques de Compostelle et le (plus moderne) GR (chemin de Grande Randonnée).
La Via Domitia.
La voie romaine fut construite à partir de 118 avant notre ère pour rejoindre Rome à la péninsule ibérique. Elle franchissait les Alpes au col du Mongenèvre au-dessus de Briançon pour rejoindre la vallée de la Durance. Elle traversait le Rhône, le plus important obstacle naturel de son parcours à Beaucaire, certainement par des bacs tenus par les Nautes ou sur un pont de barques comme à Arles. Ensuite, c’était Nîmes (avant qu’elle ne s’appelle Nemausus) puis un tracé que reprirent, à quelques détails près, les décideurs de la construction de l’autoroute A9.
Des restes tangibles dans le secteur: les milliaires, ces bornes disposées tous les mille romains (1 460 mètres), ancêtres des bornes kilométriques modernes. Il en reste 2 sur la commune du Crès:
le premier est dédié à Tibère et a servi de pierre de construction, à droite du portail de l’église,
malheureusement placé à l’horizontale,
mais redressé par la magie du numérique.
On peut lire en bas LVII soit 57 milles romains depuis Narbonne, environ 83 km. Les méthodes modernes nous donnent environ 100 km de Narbonne au Crès. Faut-il en déduire que ce milliaire été déplacé ?
Le second est dédié à Auguste. Il a été placé au centre d’un rond-point récent, avec reconstitution d’un bout de Via Domitia.
Une belle borne…
et une inscription en relatif bon état.
Un autre milliaire se trouve devant l’église de Saint-Aunès. Non loin de là, le fameux pont sur le Vidourle…
que peignit Gustave Courbet lors de son séjour montpelliérain chez le grand amateur d’art François-Xavier Fabre, co-fondateur du musée qui porte son nom. A noter que le pont n’a plus qu’une seule arche (celle de droite), l’autre ayant disparu dans les flots lors d’une violente crue, le 27 septembre 1933.
Après Perpignan, la Via se divisait en 2 pour le franchissement des Pyrénées. Une branche passait le long de la côte par Collioure et Port Vendres, une autre par le col de Panissars, actuellement sur la commune du Perthus à l’ouest du village actuel et où se trouvait la Trophée de Pompée (l’équivalent du Trophée des Alpes de La Turbie mais qui servit de carrière à la chute de l’Empire Romain).
Lire cet excellent site parlant de la Via Domitian: http://carlig.typepad.fr/viadomitia/ ou http://nemausensis.com/Nimes/ViaDomitia/VoieDomitienne01.html
A noter que les rues sur lesquelles passaient la Via Domitia portent le nom de Rue de la Voie Domitienne, rue de la monnaie et rue de Substantion. Si la première va de soi, la seconde appelée aussi Cami de la Mouneda vient du fait qu’il voyait passer, outre les Légions romaines, les collecteurs des impôts du Trésor Public de Rome. Quant au troisième nom, il s’agit du nom romain donné à l’oppidum qui a donné naissance à la commune de Castelnau-le-Lez.
L’Empire Romain disparu, c’est au IXème siècle que l’on crut découvrir le tombeau de l’apôtre Saint-Jacques en Galice et à partir de ce moment se développa le pèlerinage vers le Finistère espagnol qui prit toute son ampleur au XIème siècle. De France, quatre grands chemins furent tracés, partant d’Arles, du Puy, de Vézelay et de Paris avec une multitude de variantes. C’est le chemin d’Arles, la Via Tolosana qui passe au Crès.
La coquille, symbole des pèlerins est dessinée sur les poteaux indicateurs, à côté des indications rouge et blanche du chemin de Grande Randonnée, le GR 653, déclinaison païenne du chemin d’Arles.
A quelques kilomètres de là, à Castelnau-le-Lez, c’est dans le sol que la municipalité a fait graver les marques du pèlerinage chrétien.
La Via Tolosana part donc d’Arles, passe à Saint-Gilles (carrefour du chemin d’Arles, du chemin de Bordeaux à Jérusalem et de la voie Régordane descendant des Cévennes), continue sur Montpellier, Lodève, Castres, traverse Toulouse (à qui elle doit son nom). Elle continue sur Auch et Pau pour traverser les Pyrénées au col du Somport. En Navarre, elle retrouve les 3 autres chemins français qui empruntent le col de Roncevaux à Puente-la-Reina où commence le Camino Francès.
Fait du hasard, se tenait à quelques pas de là du chemin, une exposition d’aquarelles réalisée par une jeune femme ayant fait le pèlerinage vers Saint-Jacques en 2015, à partir du Puy. Elle se fixait tous les jours pour objectif la réalisation d’un dessin sur un moment marquant de sa journée, scène, décor, monument… tout en prenant des notes permettant de fixer ses souvenirs.
70 jours qui transforment une existence… assurait-elle lors du vernissage. A lire sur le blog de Loedi:
Texte écrit après les quinze jours passés au Crès en avril 2016, en attendant Sophia.