Au cimetière de Chamonix, sur l’un des murs célébrant la mémoire des disparus en montagne, la plaque la plus ancienne rappelle le drame Vincendon-Henry.
Fin 1956-début 1957, ce fut véritablement le premier feuilleton mis en avant par les médias, sur les ondes et dans la presse écrite. Ainsi ce Paris Match du samedi 12 janvier 1957
revient, à l’issue des événements, sur cette tragédie jouée en plusieurs actes en dessous du sommet du Mont-Blanc, tragédie suivie en direct par tout un chacun, depuis le centre de la station, pourvu d’être muni d’une bonne paire de jumelles.
La situation des lieux:
Jean Vincendon et François Henry, étudiants, alpinistes confirmés, étaient partis pour une course dans le massif du Mont-Blanc, le 22 décembre 1956 dans le but de réveillonner au sommet. Pris par la tempête et sous des températures sibériennes, ils furent coincés sur un plateau relativement proche du refuge Vallot.
Après Noël, un gros hélicoptère Sirkorsky partit à leur secours
avec à son bord des secouristes chevronnés (dont Honoré Bonnet, le futur coach de l’Equipe de France de ski qui rafla toutes les médailles à Portillo et à Grenoble).
Malheureusement, le gros engin peu maniable capota dans le secteur des naufragés avec quelques blessures pour le pilote et sans gravité pour les autres membres de l’expédition. L’équipe put rejoindre les jeunes alpinistes (d’où ces photos) mais ne put les transporter au refuge Vallot.
l’image choc qui fit le tour du monde.
Dans le même temps, une cordée partie de Chamonix et conduite par l’immense Lionel Terray, très critique envers la Compagnie des Guides, dut faire demi-tour suite à quelques incompréhensions puis devant les conditions météorologiques.
En bas, l’angoisse des familles étaient à son comble
mais les secours avaient maintenant 2 problèmes à résoudre: le sauvetage des jeunes et celui des… sauveteurs du Sirkorsky reclus au refuge Vallot avec un blessé. Ces derniers avaient tout de même pu mettre à l’abri Vincendon et Henry dans la carcasse de gros hélico écrasé avec vivres et chauffage.
Ce ne fut que le 3 janvier qu’une Alouette, appareil beaucoup plus maniable et que l’Armée avait enfin daigné détacher d’Algérie, put décoller
dans la vallée en quelques rotations.
Puis le responsable des secours, après un tour au-dessus du Sirkorsky,
décida d’arrêter là l’opération, pensant qu’il n’y avait plus de signe de vie et plus rien à faire pour les alpinistes. La carcasse du Sikorsky devint le tombeau provisoire des jeunes jusqu’au printemps. C’est à ce moment-là, quand le temps permit de ramener les corps, qu’on s’aperçut qu’à sa position, Henry devait toujours être vivant le 03 janvier!
Cette affaire causa une vive polémique. On reprocha à la Compagnie des Guides de ne pas avoir réagi plus rapidement et à l’Armée de ne pas avoir libéré une Alouette plus tôt… N’oublions pas qu’on était en pleine guerre d’Algérie et que les hélicoptères étaient utilisés pour lutter contre les fellaghas. L’Armée ne se décida à débloquer des Alouettes que seulement quand il s’agit de secourir les sauveteurs naufragés.
Mais ce drame eut le mérite de poser le problème de l’organisation des secours en montagne, inexistants à l’époque. La mort de Vincendon-Henry ne fut pas vaine puisque depuis le PGHM et autres structures avec leurs matériels et leurs hautes technicités ont sauvé de nombreuses vies dans les massifs montagneux français.